Le cerveau sous hypnose

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September 6, 2023

Le cerveau et l'hypnose - partie 1

Le cerveau, ce joyau complexe et mystérieux, abrite des fonctionnalités extraordinaires qui ne cessent de fasciner les chercheurs et les curieux. Parmi ses énigmes, l'état d'hypnose (transe) se révèle être une expérience intrigante, à la fois énigmatique et dont on observe de manière empirique - en cabinet - les potentiels. Mais alors, que se passe-t-il dans notre cerveau sous hypnose? Voici quelques pistes et découvertes à ce sujet.

Un état de conscience modifié

L'hypnose est un état de conscience altéré (état modifié de conscience) qui peut être induit par un hypnothérapeute ou auto-induit par certaines personnes. Ce n'est ni un état d'éveil, ni un état de sommeil. Ce qui rend l'hypnose fascinante, c'est que, bien que le sujet soit profondément concentré et détendu, il reste conscient de son environnement et réactif aux suggestions de l'hypnotiseur / du thérapeute.

L'observation clinique nous montre que sous état hypnotique les contradictions et d'une manière générale la dualité (soi/les autres - intérieur/extérieur, etc), tendent à se lisser au profit d'une expérience unifiée et cohérente capable de réconcilier des concepts, idées, émotions à priori antagonistes.

Ce que nous dit l'imagerie et l'observation au sujet de l'hypnose

Des études d'imagerie cérébrale ont révélé que l'hypnose entraîne des changements perceptibles dans l'activité cérébrale. L'une des régions clés du cerveau qui est impliquée dans cet état est le cortex cingulaire antérieur, qui joue un rôle essentiel dans l'attention. L'activité de cette région est le dénominateur commun que l'on retrouve chez tous les sujets analysés. En effet, lorsque que l'on observe le cerveau des hypnotisés, on y voit beaucoup de choses et ces choses varient d'une personne à l'autre, mais ce qui semble être commun , c'est cette modulation de l'attention (champ d'attention restreint et focalisé) avec une atténuation (mais pas une disparition) des perceptions venant de l'extérieur. Le sujet est totalement absorbé dans son expérience. L'hypnose semble faciliter la communication entre différentes parties du cerveau. Le cerveau est composé de nombreuses régions qui traitent l'information de manière séparée, mais sous hypnose, ces régions peuvent mieux coopérer. Cela pourrait expliquer pourquoi les personnes en état d'hypnose peuvent accéder à des souvenirs enfouis, améliorer leur créativité, ou changer certains comportements.

Quant aux ondes cérébrales impliquées lorsque nous sommes en transe, eh bien si la littérature et les études menées jusqu'ici tendent à dire que la transe telle qu'elle est communément entendue est assimilée une activité se situant entre alpha et thêta, elle semble pourtant aussi pouvoir se produire lorsque le sujet se trouve dans la zone bêta et gamma (transe chamanique induite par l'écoute de tambours et/ou la danse).

C'est particulièrement intéressant d'un point de vue clinique car j'utilise régulièrement des émotions telles que la colère ou la tristesse pour induire la transe (eh oui, les thérapeutes doivent travailler avec ce qu'ils ont sous la main, et pas tout le monde ne se présente avec la capacité ou la volonté de se détendre lors de la séance).

Certaines personnes sont-elles plus réceptives à l'hypnose que d'autres?

On me demande souvent "suis-je hypnotisable?" - dans mon humble expérience, tout le monde peut être hypnotisé - plus ou moins facilement, plus ou moins profondément mais ces paramètres dépendant largement du contexte. Parmi les facteurs qui influencent cela on trouve, en premier la motivation: une personne qui souhaite être hypnotisée, qui à une motivation et une envie de changer sera forcément plus ouverte. Ensuite, la science semble indiquer que les sujets ayant un corps calleux plus épais (le corps calleux c'est cette structure nerveuse située entre les deux hémisphères de notre cerveau) sont plus facilement hypnotisables. Cela fait penser que l'hypnose nécessite une communication accrue entre nos deux hémisphères, les sujets chez qui ce réseau nerveux est plus développé auraient donc une facilité à entrer, maintenant et utiliser cet état hypnotique. Ensuite il y a évidemment le/la thérapeute et les techniques auxquelles iel fait appelle, puis il y a le contexte présent que vit le sujet (la manière dont s'est passé sa journée, ce qu'iel vit en ce moment).

Hypnose et biochimie du cerveau

Les neurotransmetteurs jouent un rôle crucial dans le fonctionnement du cerveau et l'état hypnotique peut modifier la balance chimique. Les études ont montré que l'hypnose peut influencer la libération de neurotransmetteurs tels que la dopamine et la sérotonine, qui sont liés à la régulation de l'humeur et de la motivation. Cela pourrait expliquer pourquoi l'hypnose aide à traiter certains troubles tels que l'anxiété et la dépression, pourquoi elle aide à mettre en place certaines habitudes et pourquoi on éprouve un état de sérénité à la suite d'une séance. Vous pourrez en lire plus sur sujet dans un prochain article.

Hypnose et neuroplasticité : quels liens?

La neuroplasticité est un concept clé en neurosciences qui se rapporte à la capacité du cerveau à se remodeler et à s'adapter en réponse à l'expérience, à l'apprentissage et aux changements environnementaux. Cette capacité de changement continu du cerveau tout au long de la vie est au cœur de nombreuses avancées dans la compréhension du fonctionnement cérébral.

L'hypnose, en tant qu'état de conscience altéré, peut jouer un rôle intéressant dans la promotion de la neuroplasticité. Lorsqu'une personne est en état d'hypnose, elle est souvent plus réceptive aux suggestions et à l'apprentissage de nouvelles habitudes ou de nouveaux comportements. Cette ouverture à la suggestion peut favoriser la formation de nouvelles connexions neuronales et renforcer les voies cérébrales associées aux objectifs spécifiques de l'hypnose, tels que la gestion de la douleur, la réduction du stress ou l'amélioration de la confiance en soi.

En d'autres termes, l'hypnose peut être un catalyseur pour la neuroplasticité en permettant au cerveau de réorganiser ses réseaux neuronaux pour mieux s'adapter aux besoins et aux objectifs de la personne. Cela peut être particulièrement utile dans le cadre de la thérapie et du changement comportemental.

Bien que la relation entre l'hypnose et la neuroplasticité soit un domaine de recherche en évolution, il est clair que ces deux concepts sont étroitement liés. Ils illustrent la capacité étonnante du cerveau humain à se transformer et à évoluer, offrant des opportunités prometteuses pour l'amélioration de la santé mentale, du bien-être et du développement personnel.

Conclusion: l'hypnose est un outil puissant dont on découvre peu à peu les mécanismes d'action

Bien que nous ayons fait d'énormes progrès dans la compréhension du cerveau sous hypnose, de nombreuses questions subsistent. L'hypnose demeure un domaine de recherche en constante évolution, et chaque nouvelle découverte nous rapproche un peu plus de comprendre les mystères neurologiques qui entourent cet état fascinant de la conscience.

Que ce soit pour le traitement de certaines affections médicales, la gestion du stress ou l'amélioration des performances mentales, l'hypnose offre un champ d'exploration prometteur pour mieux comprendre le fonctionnement du cerveau humain. Alors que la recherche se poursuit, le cerveau continue de révéler ses secrets sous l'influence hypnotique, nous incitant à plonger toujours plus profondément dans cet océan de mystère neuronal.

Sources:

https://sante.lefigaro.fr/actualite/2016/08/08/25277-secrets-lhypnose-se-devoilent

Podcast Neuroasapiens: épisode no. 39 "celui où l'on parlait de l'hypnose"

"Le cerveau sous hypnose", Dr Fanny Nusbaum, Ed.humenSciences, Paris, 2022